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5 novembre 2011

DIANE A.

"J'essayais de donner des rêves à ma soeur quand nous dormions dans la même chambre. Je me penchais au-dessus d'elle, les cheveux derrière sa nuque étaient moites, bouclés, et je murmurais "éléphant, cascade, danse", mais cela n'a jamais marché." - Carte postale à Marvin Israel, 17 février 1960 (p.4)

"La photographie est vraiment une affaire de vol (...). Je me sens redevable envers chacun de mes sujets, qu'il se soit laissé prendre ou soit prêt à l'être." - Carte postale à Marvin Israel, avril 1960. (p.8)

"Je détestais la peinture et j'ai abandonné juste après le lycée parce qu'on me répétait que j'étais formidable (...) cela me mettait mal à l'aise. Je me souviens que je détestais l'odeur de la peinture et le bruit que faisait le pinceau au contact du papier. Parfois, je ne regardais pas vraiment mais j'écoutais cet affreux "squish squish squish". Je ne voulais pas qu'on me dise que j'étais formidable. J'avais le sentiment que si j'étais tellement formidable en peinture, ce n'étais pas la peine que j'en fasse." - Entretien radiophonique de 1968 avec Studs Terkel sur la crise de 1929. (p.8)

"Ce n'est pas moi qui appuie sur le déclencheur. C'est l'image qui le fait. C'est comme un coup très doux." - Carte postale à Marvin Israel, printemps 1960. (p.26) 

"(...) Je suis à Coney Island. Dans un magnifique hôtel que je te montrerai quand tu reviendras. C'est comme un manège dans un jardin ; jamais vu un endroit aussi magnifique. Ma chambre a la couleur d'une glace bleue. Hier soir, il y a eu une grosse tempête : d'abord, les vagues étaient claires et blanche, sauvages et brumeuses, et le vent était violent, si bien que tout s'envolait, battait des ailes, tournoyait, fuyait, et les quelques baigneurs qui étaient là sautaient et s'esclaffaient bêtement, leurs cheveux retombant comme des serpents sur leurs visages ; puis il s'est mis à pleuvoir à verse si bien que les rues ont été inondées. Je suis rentrée en pataugeant à mi-mollet dans une sorte de lac tourbillonnant chargé de détritus ; je faisais attention où je mettais les pieds en descendant du trottoir car c'était trop profond pour que l'on puisse voir quoi que ce soit. Aujourd'hui, le temps est magnifique. Fête bien le jour de l'Indépendance. Comment ça se passe ? Je veux dire, l'Indépendance." - Carte postale à Doon Arbus, à Camp Indian Hill, Stockbridge (Mass.), 4 juillet 1960. (p.29)

 "(...) J'ai passé une belle journée sur la 42e Rue, une journée grise qui a commencé par un peu de pluie ; et oh, comme la rue était merveilleuse ! Les gens clignaient des yeux, se donnaient des coups de coude, levaient les sourcils et se passaient les mains dans les cheveux ondulés, et j'ai vu un de tes aveugles qui voient et un hommme comme celui dont tu m'as parlé, avec le visage blême et ravagé qui-n'est-pas-là et un millier de conspirateurs isolés (...)." - Lettre à Marvin Israel, novembre 1960. (p.29)

"Je ne suis pas vraiment déçue. Je ne pouvais pas trop charger la barque. Les changements dans lesquels je me suis embarquée comme le déménagement et certaines choses nouvelles et étranges qui m'attendent, je pense, dans le domaine de la photo sont soit nécessaires soit passionnantes ; il faut que je fasse une chose à la fois (...). Je veux mettre de l'ordre et repartir à zéro." - Lettre à Peter Crookston, 19 décembre 1967. (p66)

"La convalescence est une chose assez extraordinaire (...). Pendant un moment c'est comme si je pouvais être un certain nombre de choses et que je ne supportais pas d'être simplement moi, mais maintenant, je suis contente de savoir à quel endroit je peux recommencer (...) une histoire, une certaine attitude, parce que je suis de retour dans la ville où il m'est difficile d'être aussi anonyme que je le pensais. Je redoute un peu le travail et parfois je fais semblant d'être un imposteur mais, la semaine dernière, j'ai mis mon appareil autour du cou ; je ne m'en suis pas servie mais j'étais contente de simplement le porter." - Lettre à Carlotta Marshall, fin août 1968. (p. 73)

"Je suppose que la liberté est angoissante. C'est ce que je veux mais quelque chose en moi essaie de me faire croire que je ne peux pas. Et il y a tant de choses à faire qu'il y a des moments où je m'arrête et où je regarde autour de moi, et tout paraît trop dur pour continuer. Ce n'est pas vrai évidemment. Mais c'est pourquoi les gens ont des emplois et paient des chèques (...) cela leur permet d'éluder des questions sans réponses." - Lettre à Carlotta Marshall, novembre 1969. (p.87)

"(...) Comment arrêter de penser si je fais ci il va arriver cela car parfois ça arrive, parfois pas, et j'ai dépensé beaucoup d'énergie à instaurer des contrôles magiques qui n'existaient pas." - Lettre à Carlotta Marshall, novembre 1970. (p.95)

"Pour annoncer son portfolio, elle prépare un dépliant qui comprend deux bandes-contacts des dix tirages de 24x36 mm, fixées à une feuille de papier comprenant le texte suivant, dactylographié : (...) il y a un portfolio de dix photographies par Diane Arbus, datées entre mil neuf cent soixante-deux et mil neuf cent soixante-dix, dans une édition de cinquante exemplaires, tirées, signées, numérotées, anotées par la photographe, en foirmat 40x50 cm dans une boîte presque invisible, qui sert aussi de cadre, conçue par Marvin Israel. En vente auprès de Diane Arbus, quatre cent soixante-trois West Street,New York City, pour mille dollars." 1970 (p.97)

"(...) C'était vraiment amusant car c'était un voyage purement sentimental et je savais que je n'avais rien à perdre et encore moins à gagner." - Lettre à Allan Arbus et Mariclare Costello, fin avril 1970. (p.105)

"J'avais l'habitude de penser que la conscience est en soi une vertu ; alors j'essayais de la garder entière dans ma tête dans un même moment, passé, futur, etc. J'essayais même de sentir le mal quand je me sentais bien et vice versa comme si toute absence de conscience était une sorte de péché  à la Marie-Antoinette. C'est comme jeter du lest par-dessus bord pour faire seulement ce qu'il faut faire MAINTENANT.  Une sorte de confiance qui plus tard apportera son propre maintenant (...). Cela rend le dimanche plus comme un dimanche, et même le lundi est mieux (...)." - Lettre à Allan Arbus et Mariclare Costello, 11 janvier 1971.

Diane Arbus se suicide fin juillet 1971.

 

(extraits de : "Diane Arbus, Une Chronologie, 1923-1971" par Elisabeth Sussman et Doon Arbus, Jeu de Paume & Editions de La Martinière)

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